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N°08 Mai 2009


Les jeunes algériens et leurs représentations de la femme modèle et le devenir ...

pp : 3 - 19

Mohamed Benali
  • Auteurs
  • TEXTE INTEGRAL
  • Bibliographie

« Etude empirique »

Cette communication s’inscrit dans l’Axe N° 2- La femme algérienne et le changement des valeurs

Introduction :

La modernité Telle qu’elle est conçue en occident repose essentiellement sur une philosophie de changement. Elle  signifie un l’univers  où s’articulent : le progrès, l’égalité, et la liberté. C’est surtout un basculement sociétal fondé surle dépassement de la société traditionnelle avec  ses valeurs sociales, au profit des options nouvelles. Bref, c’est un produit d’importation européocentrique optimiste et ambitieux. Partant d’un souci permanent de rattraper l’occident, les dirigeants  n’ont pas caché leur fascination et leur séduction à cette vision. Ils n’ont pas tardé à déclencher  la mise en  œuvre d’un   processus  de modernisation  sur l’ensemble de la société algérienne.

Face à  la détermination  des dirigeants algériens et leur   volonté de changement, la société algérienne s’est montrée tout le long de son histoire  accueillante de certaines valeurs exogènes, mais aussi résistante à toute forme d’homogénéisation culturelle arbitraire, susceptibles de nuire les spécificités culturelles locales.

Et, c’est à partir du rapport à la femme  que s’expriment les multiplicités des forces sociales contradictoires agissantes sur le terrain social et politique en Algérie sur le devenir de la société. La question essentielle relève de la difficulté de concevoir une femme algérienne idéale à partir d’un idéal particulier, à cause de la complicité des enjeux politiques, et la manière de concevoir le statut de la femme et son émancipation de chaque force sociale au pouvoir. C’est à travers une étude empirique que nous avons mené  sur les représentations des jeunes sur la femme modèle du temps moderne, qui a révélé que les valeurs émancipatrices sont dans l’essentiel accablées par des valeurs socioculturelles traditionnelles, soutenues par des idées religieuses contraignantes à l’esprit même de la modernité.

    L’histoire objective des sociétés humaines a montré que la femme a toujours vécu une situation dégradante et dévalorisante. Son épanouissement et son émancipation sont l’œuvre d’un processus  historique de longue haleine. C’est une opportunité pour nous à travers ce travail,  d’exposer quelques   réalités  historiques relatives au statut de la femme dans  deux expériences humaines variées dans le temps et l’espace, à savoir :

    1/ La femme dans la tradition juive ultra orthodoxe.

2/la femme française : Entre la tradition catholique et principes de la laïcité.

Et pour bien cerner le statut  de la femme dans la réalité sociale et culturelle algérienne, nous allons investir nos efforts sur deux axes essentielles : le premier est d’ordre historique portant sur :

1/La placede la femme algérienne dans le mouvement national algérien.

2/ Les Ulémas réformistes et la femme algérienne

Le second a trait sur l’analyse des résultats de nos investigations sociologiques empiriques portant sur les  questions essentielles qui sont  les suivantes :

Les jeunes algériens et leurs  représentations de la femme modèle et le devenir de la société algérienne.

1/ Les représentations de la jeunesse sur les études et professions convenant le mieux aux femmes.

2/ Les représentations de la jeunesse sur l’épouse modèle.

3/ Les représentations de la  jeunesse sur le rapport de la femme à la politique.

                                       ___________________

      1/ La femme dans la tradition juive ultra orthodoxe.

Le Talmud stipule "Mieux vaut brûler la Torah que de la confier à une femme". A priori, les femmes ne sont pas considérées comme des humains à part entière. La genèse relative au pêché, indique : pour avoir croqué le fruit défendu, sur les conseils du serpent, Ève endosse la responsabilité de la fureur divine. Celle qui vaudra aux humains d’être chassés du paradis. « A la femme il dit : j’aggraverai tes labeurs et ta grossesse ; tu enfanteras dans la douleur ; la passion t’attirera vers ton époux, et lui te dominera. »(Genèse III, 16, la Bible du Rabbinat, éd. Golbo).

Cette genèse est devenue la base d’une prière récitée dans la journée par les juifs ultras orthodoxes jusqu’’à ce jour : « Louésoit Dieu de ne pas m’avoir crée femme ».Dès lors, la femme, selon cette tradition est la source éternelle de tous les malheurs des humains sur terre. Socialement, une Juives ultra orthodoxe n’est rien en dehors de son rôle d’épouse ou de mère. Si elle n’est pas féconde, elle sera répudier et remplacée auprès de son mari.

Toujours selon ce schémas ségrégationniste d’un point de vue religieux, les Rabbins font appels à la différence biologique comme source d’évidence : « Sûrement les féministes orthodoxes ne peuvent nier que les femmes ont un rôle à jouer différent de celui des hommes, qu’elles sont différentes non seulement biologiquement mais spirituellement, et qu’en conséquence leur approche de Dieu est différente. »[1]

2/la femme française : Entre la tradition catholique [2]et principes de la laïcité.

La femme dans le Christianisme est autant méprisée que dans le Judaïsme. Saint Paul[3]revendique ouvertement le principe de la domination masculine [4] :« je veux cependant que vous le sachiez ; le chef de tout homme, c’est le Christ ; le chef de la femme, c’est l’homme ».Il ne s’agit pas ici d’une simple déclaration, mais d’un mot d’ordre structurant les recommandations de celui qu’on appelle parfois l’ « architecte » du Christianisme.[5]

Quant au père Tertullien[6], condamne le pêché éternel d’Ève en déclarant : « La sentence de Dieu sur ce sexe vit encore de nos jours. Et bien, oui, qu’elle vive ; il faut que ce crime demeure comme un opprobre éternel. Ô femme ! Tu es la porte par où le démon est entré dans le monde ; tu as découvert l’arbre la première ; tu as enfreint la loi divine ; c’est toi qui a séduit celui que le démon n’eut pas le courage d’attaquer en face ; tu as brisé sans effort l’homme. »[7].

 Même le principe égalitaire entre les deux sexes, issu de la révolution française n’était pas au rendez vous dans la réalité qu’après un retard considérable : possibilité pour les filles de préparer le Baccalauréat de garçon (1902), création d’un Baccalauréat féminin (1917). Les filles françaises n’ont le droit d’accès à l’université que depuis 1919, et qu’en 1801 le journaliste Sylvain Maréchal propose une loi interdisant d’apprendre à lire aux femmes.

       Le rôle de la femme européenne est réduit au statut d’épouse ou de mère, et elle n’est protégée par le législateur du XIXe siècle que dans le cadre de la famille, mais il ne leur octroie aucun droit politique.[8]

      La seconde moitié du xixe siècle, annonce l’avènement du mouvement féministe en même temps que les idéologies socialistes et marxistes. Ce mouvement s’incarne dans des figures telles celles de la Française Flora Tristan, des Anglaises Harriet Martineau (1802-1876) et Olive Schreiner (1855-1920) ou de la Suisse Meta Von Salis-Marschlins (1855-1929).[9] Les féministes revendiquent l’indépendance conjugale, les mêmes droits civiques que les hommes, les mêmes droits à l’éducation et à la formation, le droit d’être maître (esse) de leur corps, l’égalité des salaires, leur participation à la vie politique et syndicale. Les femmes prennent de plus en plus souvent la parole pour affirmer leurs différences par rapport aux hommes.

   Depuis le code civil note J.Baudérot, les femmes mariées sont sous le joug d’une sorte de statut personnel où leur « incapacité civile » les contraint à solliciter une autorisation pour toute démarche juridique, administrative, contractuelle et notariale. . Une stratégie de « petit pas » va leur donner le droit de disposer de leur salaire et de bien versés en (1917), d’adhérer à un syndicat (1920).[10] Il faudra attendre 1938 pour abolir l’incapacité civile,l’homme restant, sur proposition des catholiques sociaux familialistes le « chef de famille ».[11] Jusqu’au 1965 en France les maris ont encore le droit de veto sur le travail de leurs épouses, et ce n’est qu’en 1992 qu’est abolie la Loi française interdisant le travail de nuit des femmes. Notons aussi que ce n’est qu’en 1907 que les françaises peuvent disposer librement de leur salaire, et qu’en 1965 qu’elles peuvent avoir leur compte en Banque.[12]

     Entre autre, la femme française n’a pu obtenir le droit à l’avortement que selon la (loi du 17 janvier 1975 ; un partage de l’autorité parentale (loi française du 4 juin 1970) ; des procédures de divorce simplifiées (loi du 11 juillet 1975).Deux chiffres important à tenir, l’Assemblée nationale élue en 1997 comptait à peine 10% de femmes, et au Sénat, il y avait moins de 6% de femmes à la même époque. Selon le monde diplomatique (Nov.2005), seules 12,1% des femmes occupent des postes de responsabilité dans la fonction publique, alors qu’elles représentent 58% des fonctionnaires selon une étude officielle parut le 20 Septembre 2005.[13]

     Le retour de la domination masculine est devenu une réalité sociologique dans un pays censé être le plus libéral dans le monde contemporain. C. Fourest et F. Venner nous évoquent l’histoire d’un mouvement né aux États-Unis d’Amérique sous le nom : «Les promise Keepers».Il promet ouvertement le retour à la domination masculine.[14]Ce mouvement est fondé essentiellement sur les valeurs chrétiennes : «Ce qui est fondamental pour les promise Keepers, c’est le pouvoir, explique Russ Bellant, spécialiste de l’extrême droite américaine. Le pouvoir des hommes sur les femmes, le pouvoir des Chrétiens sur les non Chrétiens. ».[15]

    Le modèle libéral, européen soit-il où américain demeure, à notre sens incapable de déterminer une vraie égalité entre les hommes et les femmes, dans une époque ou les valeurs humaines sont pour l’essentielle masculines.  Bien que le libéralisme soit porteur des valeurs humanistes et laïques, le rapport de la femme à la société reste déterminé par d’autres références à caractère judéo-chrétiennes et traditionnelles. Le monde libéral parait incapable  de fournir un modèle exemplaire de femme, pour des pays ou dominent encore d’une part, des mentalités semi libératrice en faveur des femmes, et  l’omniprésente de la religion avec ses l’interprétation les  plus obscurantistes pour donner légitimité à la domination masculine d’autre part. Ces pays sont plongés encore dans l’idée que la femme s’inscrivait dans la double dépendance de la nature et de l’homme. La dépendance par rapport à la nature était inscrite dans la fonction reproductrice. De la soumission au père, la femme passait à l’obéissance du père au mari ; elle demeurait perpétuellement mineure à l’égard de l’homme.     

Le statut  de la femme dans la réalité sociale et culturelle algérienne.

     Nous proposons d’étudier  la femme algérienne et  son évolution selon    deux approches essentielles, à savoir :

   1/ La place de la femme algérienne dans le mouvement national algérien.

        La femme algérienne a toujours constitué le centre de débat des intellectuels algériens depuis le mouvement national algérien. Les premières prémisses du féminisme se sont manifestées à partir de 1910. Mais, ce sont les Hommes qui ont prit l’initiative de défendre les intérêts de la femme algérienne, voire son émancipation et leur accession à un mode de vie de type européen auquel ils aspirent eux même.  Ce mouvement défendait la cause féminine dans une vision globale de modernisation de la société algérienne, il porte le nom « le Jeune algérien ».

    Ce mouvement considère que le couple algérien n’aura aucun avenir sans la promotion intellectuelle des femmes : « On sait aussi qu’elle accomplit d’autant mieux ses devoirs qu’elle plus instruite, grâce à ses connaissances en économie domestique et dans les sciences usuelles, la femme contribue grandement au bonheur des siens (…) Le mari de la femme instruite peut compter sur elle comme sur un ami éclairé. Il se plait à reconnaître en elle des idées justes. C’est à dire elle qui qu’il doit, dans sa demeure, le bon ordre des meubles, la tenue régulière des comptes, la propriété de tous les objets » [16]

      Il est nécessaire de souligner que la femme était discuter par tous les mouvement nationaux, UDMA, MTLD etc.[17] Le problème de la femme et son devenir ne parait pas si simple, car tout le monde s’interrogeait sur le fond culturel à partir duquel doit être pensée  l’émancipation de la femme. C’est à partir de la question de la femme que se sont  développées deux visions, voire deux idéologies, ou chacune puise ses références de sa propre source, à savoir, les intellectuels de l’UDEMA, représentaient l’Algérie à la lumière du temps moderne,[18] et les militants du MTLD, représentaient l’Algérie ancienne, par ses particularités culturelles et religieuses.

    Quelque soit l’acharnement de leur combat, les intellectuels algériens se sont montré très timide face à la structure mentale traditionnelle dominante en Algérie. Les égyptiens étaient plus avancés dans le domaine du militantisme pour la cause féminine. [19]Au Maghreb, seule l’initiative de Tahar El Haddad[20] , accusé de renégat, a cause de son célèbre ouvrage « Notre femme, la législation islamique et la société » (1930), auquel s’attaque avec acharnement contre les valeurs traditionnelles stériles, celles qui touchent au voile, la claustration, le mariage précoce des jeunes filles etc., il note ainsi : « La jeune fille devient farouche et retirée n’osant supporter la compagnie des grands fussent-ils son père ou son frère aîné. Ce manque d’assurance se retrouve plus tard dans toutes les activités et de la franchise même quant-il s’agit de son avenir, du choix de son époux que l’on désigne à sa place (…) Et pourtant, certains continuent à défendre leur conception erronée de la pudeur et de la réserve féminine qui se confondent dans leur esprit avec faiblesse et effacement de la personnalité. En réalité, ce n’est qu’un prétexte pour lui imposer le joue de la tyrannie masculine ».[21]

             2/  Les Ulémas réformistes et la femme algérienne.

     Les Ulémas condamnent violemment la mixité des sexes, l’émancipation des femmes selon la vision occidentale. Lamine Lamoudi, en 1929 déclare : « Il ne me plairait pas de voir la jeune fille musulmane parmi celles qui « portent » le Baccalauréat et le Doctorat. Il me suffit de la voir posséder les connaissances indispensables de sa religion ». [22]

    Les réformistes refusent de voir la femme algérienne évoluer dans un contexte socio-historique ou les seules valeurs d’émancipation sont liées au projet colonialiste avec sa vision humaniste et laïque. Monique Gardant souligne : « Tout autre projet de modernisation se trouvait condamné comme assimilationniste (…) Les femmes allaient se trouvaient prisonnières d’une vision conservatrice qui se justifiait par l’anticolonialisme (…)Malgré sa radicalité qui faisait de l’indépendance le préalable à toute transformation de la société algérienne, le nationalisme révolutionnaire allait, comme les Ulémas, définir l’identité nationale par la langue arabe et la religion , enfermer la femme dans le sacré et la permanence. »[23]

            La vision des Ulémas reste prisonnière d’un cadre culturel spécifique relatif au rapport de l’homme à la femme. Aujourd’hui, l’attitude des réformistes reflète l’Islam officiel veut sans doute le changement, surtout de certaines traditions hostiles à l’émancipation de la femme, dans la scolarité ou dans le travail.

       Le pouvoir politique algérien et ses intellectuels  organiques soient-ils ou traditionnels, ont toujours misé sur  le développement et ce qui suit, l’urbanisation et  la scolarité, comme étant des facteurs participant à la transformation sociale et culturelle de la société.

        L’histoire de l’accès à l’égalité des sexes est conçue par les sociologues occidentaux comme un bon catalyseur de la laïcisation de la société, en termes de droit naturel et d’égalité civile et politique. Bien que les démarches des dirigeants algériens dans ce sens, semblaient dés le départ, timide et fragile ; l’importance stratégique attribué à l’institution éducatif, découle de sa mission de redistribution des rôles et comme puissant facteur de changement, tant au niveau de la société qu’au niveau des individus. Elle est surtout perçue comme étant en mesure de modifier l’équilibre des rôles masculins et féminins, et de bouleverser les conduites et les mentalités des jeunes algériens.

Bien que ces phénomènes de mutation, basés sur un schéma  évolutionniste et optimiste ont émergé quelques signes de modernité, ils ont aussi  agir sur les traditions comme une véritable agression. L’étude et l’analyse de la place de la femme en Algérie s’opère plutôt très complexe à cause de la confusion qui s’impose toujours entre religion, modernité et système de valeurs traditionnelles.

    Le rapport entre système de valeurs traditionnels/modernité et Islam constitue le domaine privilégié de notre présente réflexion. C’est là ou nous situerons les parcours et les changements dans les attitudes et les représentations des jeunes algériens d’aujourd’hui.

  Les jeunes algériens et leurs  représentations de la femme modèle et le devenir de la société algérienne.

     La question de la femme demeure  problématique encore pour longtemps. Car, son statut et son rôle social s’inscrivent dans un cadre d’une dialectique sociale et culturelle complexe ou s’articule deux dimensions, présent par rapport au passé et présent par rapport au futur. Dans cette dialectique, les intellectuels traditionnels incarnent le passé avec une vision conservatrice et semi libératrice, et les intellectuels laïco-modernistes, incarnent une vision moderniste, souvent trop optimiste. C’est en fonction de ces rapports que se dégagent des variétés d’attitudes contradictoires où chacune représente une référence culturelle avec des valeurs adéquates.

       C’est à ce niveau aussi, que se situe la problématique de l’ancien et du nouveau, dans un contexte de mutation et de transformation de la société. Les valeurs traditionnelles et religieuses régissent en permanence les rapports inter sexes, et constituent en même temps, le refuge le plus sûr pour protester contre les agissements brutaux des valeurs modernes sur la structure mentale traditionnelle.

      1/Les représentations de la jeunesse sur les études et professions convenant  le mieux aux femmes.

    Un pays économiquement et socialement avancé est celui qui offre la même chance de réussite et de promotion sociale aux deux sexes. Son degré d’évolution se mesure ainsi, par le degré de participation de la femme dans la vie active du pays.   L’égalité des sexes en matière d’éducation et de la scolarisation constitue, dans un pays qui se veut démocratique, l’un des principaux paramètres du changement social et culturel de la société.

    Le phénomène de la scolarisation des filles et leur concentration dans certaines disciplines, ainsi que leur intégration dans le monde de travail s’explique, semble t-il par des déterminations multiples,  (historiques, sociologiques et culturelles, etc.). Tous les jeunes interrogés[24]dans notre enquête, adhèrent au principe du travail des femmes et leur scolarité  prolongée. Bien que cette attitude   est  révélatrice d’une  situation du progrès  en faveur des valeurs modernes, mais, elle cache derrière elle une autre réalité plus profonde, voire inquiétante. Car, la majorité des sujets enquêtés privilégient  certaines professions et certains enseignements par rapport à d’autres, sous prétexte qu’elles s’adaptent  le mieux avec la féminité et le statut sociale des femmes.[25]

 Leurs déclarations  dévoilent une réalité décourageante en faveur de l’avenir scientifique et culturel des filles.

 « La fille ne peut pas avoir du respect que dans les enseignements qui débouchent aux professions féminines. Les études qui conviennent aux filles sont celles qui lui font préserver sa féminité d’abord. La Médecine lui convient très bien, ainsi que les langues étrangères qui débouchent vers l’enseignement. Elle sera très bien respectée par tout le monde. »

Jeune oranais, serveur dans un café 22 ans.

« En théorie, la fille possède toutes les capacités d’étudier et réussir dans n’importe quelle discipline, mais, la tradition veut que la fille étudie que les filières lui permettant d’affirmer sa féminité, comme la médecine ou les langues étrangères. »

Etudiant en langues étrangères, 24 ans.

Les sociologues sont unanimes que l’intégration de la femme dans le marché du travail devrait inévitablement bouleverser la structure sociale traditionnelle.[26]Une femme capable de subvenir à ses besoins économiques est, sans doute, relativement libre et par conséquent peut affirmer son identité personnelle dans la sphère sociale et familiale. F ; Mernissi, féministe marocaine, souligne « que l’accès de la femme au marché du travail, sera perçu comme une démission du mari et un affaiblissement de son pouvoir, d’autant que ce pouvoir est défini en terme de contrôle et de droit de commander ».[27]

Bien que notre étude a révélé que les filles se sont montrées plus déterminées sur la question du travail féminin (soit 40/50 des sujets), en se basant sur deux principes essentiels, à savoir : l’utilité d’investir tous les efforts humains pour le développement du pays, et  surtout concrétiser le principe d’égalité entre les deux sexes, dans une société à prétention démocratique comme la notre. Mais la question selon laquelle la femme doit-elle s’investir totalement dans la scolarité, et exercer toutes les professions, les filles reste sceptiques.

« Le proverbe dit « qu’une main toute seule ne peut applaudir ». Les gens qui sont encore hostiles au travail des femmes, ils ont besoin de se remettre à jour dans un monde qui ne cesse pas de changer. La femme restera toujours le fer de lance de chaque pays qui veut rattraper son retard comme le notre. Mais, ce qui est important aussi, c’est que  la femme ne doit pas s’éloigner de son rôle naturelle  de mère ».

Secrétaire d’administration, 26 ans.

« Personne ne peut douter de l’importance du travail féminin dans notre pays. Mais la seule chose qui nous dérange, c’est bien la nature de certain domaine de travail qui n’est pas appropriés à la femme. »

Etudiante en sciences médicales, de 28 ans.

Du point de vue sociologique, le travail féminin, comme la scolarité et la maîtrise de la fécondité, représentent trois données essentielles capables de contribuer à la diminution du pouvoir masculin au sein de la famille, et bouleverser en même temps, les structures sociales et culturelles de la société traditionnelle.

 « Par principe je suis favorable que la femme exerce toutes les profession. Moi, personnellement, quand j’amène ma femme pour une consultation, je préfère qu’elle soit examinée par une femme, c’est mieux. »

Étudiant en biologie, 4e année, 24 ans.

   Du point de vue sociologique, ces attitudes hostiles ou sceptiques  au travail féminin, ne sont pas différentes de celles qui privilégient certaines professions par rapport à d’autres, comme la Médecine, ou l’enseignement. Toutes relèvent de l’idée que la femme est un être différent de l’homme, dans son rapport à la société. La vision traditionnelle reste dans l’essentielle influente dans la détermination des représentations  des individus sur le statut et le rôle attribué à la femme dans la société.

Selon la vision traditionnelle, la femme est donc amenée par sa nature à choisir les carrières professionnelles les plus conformes à sa féminité et à son statut. Ce qui est paradoxale, la femme autant que l’homme est prisonnière de la vision traditionnelle, qui lui réserve une position inférieure dans le système social hiérarchique. Elle est victime d’une idéologie ségrégationniste reproduisant le statut classique de la femme procréatrice, éducatrice et soumise sans compromis à l’homme.

Le rapport traditionnel à la femme puise également ses idées et son fondement dans la religion islamique. Celle-ci donne à la femme un ensemble de droits et de devoirs envers la société. Elle bénéficie du même droit que l’homme face à la culture et au travail. Mais c’est au mari qu’est confiée la responsabilité de subvenir totalement aux besoins fondamentaux de son épouse et de ses enfants, sans tenir compte de l’état de la fortune personnelle de son épouse. « Les hommes ont autorité sur les femmes du fait qu’Allah a préféré certains d’entre vous à certains autres, et du fait que (les hommes) font dépense, sur leurs biens (en faveur de leurs femmes). »[28]

Dans un contexte purement sociologique, le rapport au travail féminin constitue le véritable enjeu dans la société algérienne en mutation. C’est par rapport au travail féminin que toutes les contradictions sociales et culturelles se dévoilent et se confrontent, aussi bien au niveau des élites aux pouvoir, qu’au niveau de la masse.

2/ Les représentations de la jeunesse sur l’épouse modèle.

L’image traditionnelle de la femme est façonnée selon  l’évolution de la société et ses contradictions internes. Elle s’inscrit dans les idées familiales, dans les formes de pensée et de conduite de la collectivité. Notre étude a révélé que la domination masculine est intégrée dans la conscience des femmes. Ce rapport de domination en faveur des hommes, est bien entretenu, à la fois, par les hommes que  par les femmes. 

Il semble aujourd’hui plus difficile que jamais, d’analyser le statut de la femme ou de l’épouse, à la lumière d’un paradigme particulierdominant le champ social et culturel (traditionnel  soit –il ou  moderne).Car la femme  algérienne d’aujourd’hui ne peut être qu’à l’image de l’homme algérien et ses positions,  tantôt  ambivalentes et tantôt contradictoires.

De ce fait, tout ce qui relève de la femme reste problématique, encore pour longtemps. Son  statut ne peut être dessiné sur la norme européenne, comme le veulent les laïco-modernistes, et non plus sur le modèle traditionnel comme le souhaitent les conservateurs traditionalistes modérés, et moins encore sur la base islamiste,  comme le veulent les fondamentalistes.

Sur la question portant sur les qualités du conjointe, les entretiens semi directifs, ont montré que 45/50 des garçons, préfèrent que leurs conjointes soient d’une bonne moralité .L’histoire du mariage, est un engagement à vie, pour cela, il est impérativement nécessaire d’accorder le privilège à la morale de l’épouse, rien d’autre. Les garçons, se montrent  indifférents à l’aspect intellectuel des femmes. Même les filles qui ont opté pour l’ouverture du conjoint (e) sur les valeurs de notre temps (soit 35/50), elles ont associé cette qualité à la morale islamique.

« Le mari que j’imagine doit être pieu et  capable de défendre l’honneur de sa petite famille. Il faut qu’il soit juste avec moi et il me respecte. Je pense que ces qualités sont même le fondement de notre religion. En ce qui concerne la femme, elle devrait être d’une bonne moralité, capable de protéger l’honneur de son mari ».

Etudiante en informatique, 3e année, 22 ans.

       « Je souhaite que ma femme soit émancipée. C’est une question d’adaptation avec le temps moderne. Mais, ceci veut dire aussi, rejeter en bloc les  traditions et les principes de notre religion. L’essentiel dans la vie conjugale, c’est l’amour et le respect mutuel. ».Trabendiste 27 ans.

L’essentiel chez les jeunes d’aujourd’hui, c’est de trouver un partenaire avec qui, l’entente est possible, l’amour se construit avec le temps. Néanmoins, la présence des parents et leur soutien reste toujours une condition indispensable de réussite de leur mariage. Mais, à cause de la complexité du mariage et la crainte de son échec, la grande proportion des sujets estime que  la fréquentation avant  l’union conjugale, reste une chose indispensable pour mieux se connaitre et prendre les meilleurs décisions. (Soit 40/50 pour les garçons et 35/50 pour les filles).

Les jeunes garçons  d’aujourd’hui paraissent résolument hostiles au principe d’imposition univoque de la conjointepar les parents. Bien que le soutient familiale est toujours sollicité, ils ne veulent pas non plus, que leurs propres sentiments soient écartés dans telle entreprise d’avenir.

Concernant les taches domestiques, les garçons sont unanimement convaincus que les femmes sont  plus habilitées à ce genre de travail, à cause de leur savoir faire. Exceptionnellement l’homme peut s’en occuper de ces taches dans des conditions particulières et limitées.

Afin de pousser notre investigation le plus loin possible, nous avons interrogé nos sujets sur la question des filles qui fument pour exprimer leur égalité avec les hommes.  Leurs attitudes étaient impressionnantes, voire extrémistes. Ils considèrent que «  la femme qui fume dans le contexte algérien, n’est pas loin se livrer ouvertement à la prostitution ».Même les garçons universitaires qui se montrent modérés, se déclarent indifférents sur cette question en général, mais quant-il s’agit  des filles susceptibles de devenir leurs femmes, ils deviennent systématiquement réactionnaires.

La femme et la cigarette en Algérie constituent l’une des réalités les plus épineuses dans une conjoncture d’ouverture au libéralisme. Même les intellectuels les plus modernistes, porteurs d’un projet émancipateur pour la femme, n’ont pas assez de courage d’affronter le conformisme masculin, et tolérer que leurs femmes puisse fumer en public.

Sur la question relative au voile, la  littérature occidentale considère qu’une femme arabe ou musulmane voilée, est souvent qualifiée de créature opprimée, enveloppée, et humiliée. La suppression du voile et la pénétration des femmes dans des milieux auparavant masculins, seraient donc perçus comme un signe de son émancipation et son évolution.

Ils se trompent tout ce qui croit que le Coran a inventé le voile. Ce dernier n’a rien de religieux, c’est une coutume instaurée par des peuples de l’ère païenne « La Djahiliya », époque de l’ignorance de la religion. Le Coran ne «prescrit» pas le voile. Il ne fait que recommander aux femmes de le porter d’une manière décente.[29]Les principes éthiques que le Coran défend sont la pudeur et une attitude de réserve en matière d’attirance entre les sexes.

En Algérie, comme au Maghreb arabe, le voile est un synonyme de citadinité et d’émancipation dans certaines formes. L’absence de voile est souvent considérée comme signe de décadence, a contrario, le voile signifie la pudeur ; par suite, il protège la femme des conduites aventureuses des hommes, puisqu’il dérobe les arguments de la sensibilité chez la femme. Cette argumentation découle d’un principe religieux par excellence, mais aussi, s’inspire autant d’une attitude purement personnelle et conjoncturelle pour certaines femmes. Bien des femmes non musulmanes en ont fait dans beaucoup de sociétés arabo-musulmanes.

L’histoire de la femme dévoilée de type européen en Algérie, remonte à l’époque coloniale. Il s’est manifesté progressivement chez la petite bourgeoisie citadine qui vivait à l’occidentale dans les milieux européens. La femme dévoilée représentait, la rupture de la société traditionnelle, elle caractérise l’émancipation et l’ouverture, tandis que la femme voilée était dévalorisée et jugée arriérée et dépassée par le temps et les événements.

Et, avec le développement national, la scolarisation et l’ouverture progressive vers le monde occidental, l’image de la femme dévoilée réapparait pour exprimer l’idéal de la femme algérienne moderne, émancipée au même titre que l’européenne. Le voile dit « islamique », s’est introduit en Algérie, surtout après la révolution islamique en Iran (1979). Et, ensuite avec la montée des forces fondamentalistes activistes sur le champ social, politique et intellectuel. Ce type de voile découle d’une vision religieuse fondamentale, déterminant l’espace, le statut, et le rôle social particulier attribué à la femme dans la société.

Notre enquête a révélé un refus catégorique le port du voile obscure (Djilbab) de type afghan par les  jeunes -filles et garçons. Car, il est considéré comme contraire à nos traditions. Les filles dans cette proportion représentent 42 cas sur 50 interrogées.

     Les partisans du voile (72%) estiment que celui-ci ne doit pas exprimer une contrainte sociale, mais plutôt un des critères permettant la distinction de la femme algérienne de la femme européenne. Le voile, dans ce contexte est appelé « Hidjab » loin d’une  couleur précise, ou une référence culturelle exogène à la réalité algérienne.

« Le Hidjab est conçu comme un système de sécurité de la femme. Personne ne prétendra que le hidjab est un obstacle à l’émancipation de la femme. Au contraire, l’émancipation concerne à priori sa participation  au développement. Actuellement, et au nom du progrès,  on ne  parle plus de femme dévoilée, mais entièrement « nue ». Bref,  Le Hidjab est un moyen d’identifier une femme de bonne moralité. »

Étudiant en psychologie, 4e année, 25 ans.

    Sur le rapport de la femme à la politique, Il est important de rappeler que depuis que le mode est monde, la politique, c’est l’affaire des hommes, à quelques rares exceptions prestigieuses prés, depuis Sabaâ ,Zénobie  et Cléopâtre jusqu’à Golda Meir, Indira Gandhi et Tatcher. Donc, ni les Grecs, ni les Arabes, ni les Européens Du Moyen-Âge n’ont toléré qu’il soit une bonne chose que la femme gouverne les hommes. Madame de Staël[30], considérait qu’ « on a raison d’exclure les femmes   des affaires publiques et civiles. Rien n’est plus opposé à leur vocation naturelle que tout ce qui leur donnerait des rapports de rivalité avec les hommes ».


     En Algérie, et  dans le souci de moderniser la vie politique et renforcer les valeurs démocratiques, les dirigeants algériens ont cherché à pousser la participation des femmes dans la vie politique de façon spectaculaire,  en présentant au monde musulman, le meilleur exemple de femme  candidate  au présidentiel de 2004. 

      A travers notre présente  étude, nous avons demandé aux jeunes, s’il est bénéfique pour l’Algérie qu’une femme postule un poste de Président de la république ou chef de gouvernement ?

      Les résultats sont surprenants, dans la mesure où l’écrasante majorité des deux sexes refuse que la femme atteigne un poste supérieur dans la société algérienne, soit 90% en en basant sur   les arguments suivants :

« La femme n’est même pas capable de s’abstenir aux tentations des hommes, sur des choses qui lui appartiennent directement (son honneur), à cause de sa faiblesse. Comment voulez vous qu’elle puisse sauvegarder l’honneur de tout un peuple ».

        Étudiant en sciences naturelles, 4e année, 23 ans.

Les jeunes estiment qu’il y a une seule opportunité pour  la femme pour gouverner : « lorsque le pays sera vidé des hommes ». C’est l’attitude, jadis exprimée en Europe en 1586 avec le juriste Jean Bodin sur le statut de la femme dans ses six livres de la République : « Quant à l’ordre et à la condition des femmes, je ne veux pas m’en mêler. Je pense simplement qu’elles doivent être tenues à l’écart de toute magistrature, poste de commandement, tribunal, assemblées publiques et conseils, de sorte qu’elles puissent accorder toute leur attention à leurs tâches féminines et domestiques ».


    Il ressortde cette étude  que la question de la femme ne peut être analysée  qu’en dehors des aspirations et représentations de la jeunesse d’aujourd’hui.Dans le contexte algérien, il est difficile de concevoir une femme algérienne à partir d’un modèle particulier. Car, les paradigmes sont multiples, à cause de la complexité des enjeux politiques et la manière de chaque force sociale de concevoir l’émancipation de la femme

Conclusion.

       Certes en Algérie, personne ne prétendra dévier le chemin de la modernité, mais la majorité s’interroge sur sa répercussion sur les  valeurs locales. Ce qui est  sûr, la jeunesse d’aujourd’hui est sensiblement  hostile à toute imposition d’une vision intégrale de modernité, ou la laïcité constitue son fondement essentiel. Et, c’est à travers  les idées relatives aux femmes que  se situent les véritables enjeux de la société algérienne.

    Parler d’une configuration particulière de la femme, à partir d’une analyse binaire entre universitaires et non universitaires, ne constitue pas  un bon clivage.Et, il serait   très difficile  aussi de définir une norme chez les jeunes algériens. Car, Ils se montrent  en majorité modernistes, tout sexe confondu, quant il s’agit de vouloir rattraper l’occident. Mais,  quant-il s’agit de dessiner l’image de la femme modèle de demain,  ils se montrent  plus que jamais traditionnelles. Et, par conséquent, les valeurs libératrices inspirées de la modernité sont protestées, à cause de leur agissement brutal, voulant dissoudre toute différence entre les deux sexes, sous prétexte de l’émancipation. Cette démarche ne fait qu’entraver la marche de la modernité.

     En conséquence, la femme ne peut être vu à partir d’une conception semi-libératrice que développaient t les réformistes, à savoir :

1/-Qu’elle peut bénéficier de tous les atouts de la modernité, comme la scolarité et le travail, mais,  en tenant compte de sa donnée biologique et physiologique et son rôle d’épouse et de mère.

2/-La femme devrait impérativement lier son émancipation aux exigences de la morale et de la religion, comme seule garantie pour préserver l’équilibre sociale et les rapports de force existants.  Ce qui explique bel et bien,  le bien fondé pour la femme de ne prétendre régner un jour  à la tête de la magistrature du pays.

3/- la femme algérienne de demain est porteuse d’un hidjab pour valoriser  une référence identitaire, et comme synonyme de chasteté.

4/- La liberté de la femme doit être adaptée et ajustée aux données sociologiques particulières de l’Algérie. De ce principe découle l’idée que, les cigarettes pour l’algérienne deviennent nocives pour sa santé morale et pour l’algérien est nocives pour sa santé physique.

    Sur la question des représentations de la jeunesse sur la femme modèle du temps moderne, s’est dégagé des attitudes sur le devenir de la société algérienne,  à la lumière d’une  modernisation susceptible de modifier les rapports entre les hommes et les femmes. Même les intellectuels les plus modernistes, porteurs d’un projet émancipateur, n’ont pas assez de courage d’affronter le conformisme masculin, et tolérer de la femme soit impliquée totalement dans les valeurs modernistes.

     Notre étude empirique, a révélé aussi que les valeurs émancipatrices sont dans l’essentiel accablées par les valeurs socioculturelles traditionnelles soutenues par des idées religieuses contraignantes à l’esprit même de la modernité.

     Et, c’est à partir du rapport à la femme  que s’expriment les multiplicités des forces sociales contradictoires agissantes sur le terrain social et politique en Algérie sur le devenir de la société. Il demeure cependant difficile de concevoir une femme algérienne idéale à partir d’un modèle particulier, à cause de la complicité des enjeux politiques  et la manière de chaque force sociale au pouvoir, de concevoir le statut de la femme et son émancipation.

Les théoriciens du mixage entre l’authenticité et modernité représentés par  les intellectuels traditionnels « arabo-islamistes » au pouvoir, partent du principe du refus catégorique de toute sacralisation du passé. Ils visent, selon une idéologie de consensus, à reconstruire l’image de l’Algérie de demain, à travers une démarche réformiste, stipulant la conservation du patrimoine de la nation en épousant consentement certaines valeurs du temps moderne.

   

                            

 


   Bibliographie

1/Amrane.D, Les Femmes algériennes dans la guerre, Plon, Paris, 1991.

2/ Barbier.M, La laïcité, L’Harmattan, Paris, 1995.

3/ Baudérot.J, Histoire de la laïcité, que sais-je, Puf, Paris, 2000.

4/ Bessis.S ; Belhassen.S, Femmes du Maghreb : l’enjeu. Ed.J.C.Lattès, Paris, 1992.

5/ El-Haddad.T, Notre femme,la législation islamique et la société, Maison tunisienne de l’édition, 1978.

6/ Gardant.M, Nationalité et Citoyenneté, les femmes algériennes et leurs droits, in les femmes et la modernité, « Peuples méditerranéens », N° 44-45, Juillet-Aout 1988.

7/ Guy.C, la laïcité principe universel, éd. Félin, 2005.

8/ Mernissi.F, Identité culturelle et Idéologie sexuelle, le cas du Maroc et de la Chine, 14e congrès international d’Alger, OPU, Alger, 1978.

9/ Fourest.C ; Venner.F, Tirs croisés, la laïcité à l’épreuve des intégrismes juif, chrétien et musulman, Calmann-Lévy, Paris, 2003.

10/ Louis.M, Étudesur la condition de la femme musulmane au Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie), paris, 1910. 

11/ Merad.A, Le réformisme musulman de 1925-1945, Mouton, Paris, 1967.



[1]Fourest.C ; Venner.F, Tirs croisés, la laïcité à l’épreuve des intégrismes juif, chrétien et musulman, Calmann-Lévy, Paris, 2003, P28.

[2]Dans l'Ancien Testament, deux livres sur 46 sont consacrés à des femmes, et plus de 80% des personnages sont des hommes. En France, il existe 20 % de femmes pasteurs.

[3]  St Paul est né à Tarse, capitale de la province romaine de Cilicie, vers le début de l'ère chrétienne, dans une famille juive. Converti sur le chemin de Damas, Paul, premier théologien et premier missionnaire du christianisme..

[4]Jusqu’à l’époque des lumières, la situation de la femme reste désastreuse et défavorable à son émancipation.  J.J.Rousseau, philosophe de cette époque écrit en 1762, dans l’Émile ou De l’éducation (Livre V), que « plaire aux hommes, leur être utiles, se faire aimer et honorer d’eux, les élever jeunes, les soigner grands, les conseiller, les consoler, leur rendre la vie agréable et douce, voilà les devoirs des femmes dans tous les temps, et ce qu’on doit leur apprendre dès l’enfance ».

[5]Fourest.C ; Venner.F, Op.cit., P 34.

[6]  Le père Tertullien, né païen, d'éducation et de formation païennes, cultivé, curieux, inquiet de tempérament, il occupe une place particulièrement importante dans l'histoire du christianisme, mais aussi dans celle des lettres latines. Il est considéré comme étant  l’un des premiers  moralistes et des grands théologiens d'Occident. © Encyclopædia Universalis 2004, tous droits réservés.

      [7] Ibidem, P 35.

        [8] L’article 213 du Code civil français (1804) proclame que « le mari doit protection à sa femme, la femme obéissance à son mari ».

      [9] Microsoft ® Encarta ® 2006. © 1993-2005 Microsoft Corporation.

[10]Jusqu’à maintenant, la femme est toujours subordonnée à l’homme selon la tradition catholique. Lors d’un entretien réalisé à St Nicolas-du Chardonnet en 1991, on nous a appris à quel point la soumission de la femme, même dans un milieu aisé parisien, n’avait rien d’une demi-mesure. Lors d’une enquête menée sur les femmes d’extrême droite française, les enquêteurs ont cherché à interviewer les militantes proches du front national. La responsable de la permanence de l’Église donna son accord pour l’interview puis se révisa en disant : « Ca ne pourra pas marcher si nous n’avons pas l’accord d’un homme ». Après avoir cherché elle aperçut un électricien en train de changer une ampoule. C’est à lui qu’elle demanda  l’autorisation  de pouvoir répondre  à leurs question(…) cette soumission symbolique est significative de l’importance cruciale  qu’elle revêt aux yeux de militantes catholiques  intégristes ,même françaises, même aisées. In, Fourest.C ; Venner.F, Ibid., P 41-42.

     [11] Baudérot.J, Histoire de la laïcité en France, Que sis-je, PUF, Paris, 2000, P 90.

   [12]  Pendant la révolution française, Marat (autodidacte, devenu médecin en GB, fut assassiné par une de leurs amies, Charlotte Cor) résumera l’avis quasi-unanime des députés en la matière dans son projet du 17 Aout, publié seulement le 23 Août : « Tout citoyen étant membre du souverain doit avoir droit de suffrage et la naissance seule doit donner ce droit : mais les femmes et les enfants ne doivent prendre aucune part aux affaires, parce qu’ils sont représentés par les chefs de famille. »Voir, Guilhauman.J ; Lapied.M, L’action politique des femmes  pendant la révolution française, in Encyclopédie politique et historique des femmes, sous la direction Christine Fauré, PUF, Paris, 1997, P 142.Quant à  Saint Paul, Il  préconise un comportement particulier pour les femmes dans les assemblées : « Que les femmes se taisent dans les assemblées, car il ne leur est permis de prendre la parole ; qu’elles se tiennent dans la soumission, selon que le loi même le dit. Si elles veulent s’instruire sur quelque point, qu’elles interrogent leur mari à la maison, car il est inconvenant pour une femme de parler dans une assemblée. ». In, Fourest.C ; Venner.F, Tirs croisés, la laïcité à l’épreuve des intégrismes…Op.cit., PP 40.

    [13]Enquête de Marina-Da Silva, le Monde diplomatique, Novembre 2005. Il est important de signaler que la France accuse un retard important par rapport aux autres pays de l’Union européenne (UE), se situant en 2001 au 59e rang mondial en termes de représentation des femmes dans la vie politique. Il a fallu à titre d’exemple le 3 mai  2000, pour que l’Assemblée nationale tranche le débat en adoptant une loi relative à l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, qui seront promulguée le 6 juin de la même année. La loi sur la parité s’applique aux élections municipales pour les communes de plus de 3 500 habitants, aux élections régionales, sénatoriales et législatives, ainsi qu’aux élections européennes.

  [14] Ce mouvement est composé de 40% d’hommes noirs. Il n’a rien d’un mouvement antiraciste.

  [15]  En octobre 1997, les « Promise Keepers »faisaient défiler plus d’un million d’hommes dans les rues de Washington DC ; leur prédication porte sur l’éradication de l’adultère, de l’homosexualité, du divorce et de l’avortement. Voir, Fourest.C ; Venner.F, Op. Cit, P 49.

[16]« La voix des Humbles », N° 39, Novembre 1925, P 23.

[17]  Lire quelques éléments bibliographiques sur la femme algérienne à l’époque coloniale : Louis.M, Étude sur la condition de la femme musulmane au Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie), paris, 1910 ; Mathéa.G, La femme Chaouia de l’Aurès, étude de la sociologie berbère, Alger, 1921 ; Heuriette.C, La vie mystérieuse des harems, Hachette, 1927 ; Elissa.R, Le mariage de Hanifa, Plon, Paris, 1926. Concernant les mouvements associatifs féministes de cette époque, on peut citer : L’Union des femmes d’Algérie (UFA), créée en 1944 et qui regroupe à son apogée en 1946 quelque 20 000 militantes dont de nombreuses musulmanes encadrées par les filles et les épouses des Communistes. AFMA (Association des femmes musulmanes algériennes), Sous la présidence de Hamida Chentouf. Elle est considérée comme appendice du MTLD, fondée en Juin 1947. Elle n’est pas considérée comme mouvement féministe, ni politique. Elle n’a pas d’adresse fixe, ni une boite postale. Elle s’est livrée juste à des œuvres sociales-D.Amrane écrit : « Les actions sociales, distribution de vêtements et de vivres dans les bidonvilles, circoncision d’enfants pauvres, ne sont nullement la raison d’être de l’AFMA, c’est simplement une tentative inefficace mais désespérée de ces militantes de remédier à un état de misère qu’elles ne peuvent pas supporter ». Voir, Amrane.D, Les Femmes algériennes dans la guerre, Plon, Paris, 1991, P 38. On estime pendant la guerre de libération nationale (1954-1962), 10949 moudjahidates (combattantes), sont recensées au Ministère des anciens moudjahidines, dont 18% de militaires, 82% de civiles versées dans l’intendance de la guerre, 14% d’entre elles ont connu la prison et prés de 10% ont été tués au Maquis ou sont mortes en détention Voir, Bessis.S ; Belhassen.S, Femmes du Maghreb : l’enjeu. Ed.J.C.Lattès, Paris, 1992, P.49.

[18]A la lumière de la révolution Turque, Ferhat Abas, écrit dans son manifeste en 1943 : « La société musulmane eut à retenir, en 1922, un enseignement capital : la révolution turque et l’œuvre de Mustapha Kamel. Dans le conflit intérieur qui oppose, chez les musulmans, ceux qui s’accrochent aux passé et ceux qui veulent aller de l’avant. L’immortel Atatürk et son œuvre sont des facteurs déterminants. La Turquie nouvelle a ouvert des horizons nouveaux et pèse d’une manière heureuse et de tout son poids sur l’avenir de l’Algérie musulmane. »Voir Le manifeste du peuple algérien, 31 Mars 1943).

  [19] Le premier mouvement féministe a été fondé en 1919 par Huda Pacha Shaârawi (1882-1947) à la faveur du mouvement nationaliste égyptien auquel les femmes participent activement. Puis, l’apparition de Doria Shafik qui fonde l’association Bent en Nil, jusqu’à maintenant avec la célèbre égyptienne Nawal Sadaoui et la marocaine Fatima Mernissi.

  [20] Tahar Haddad, né en 1899 à Tunis et décédé en 1935, est un penseur, militant syndical et politique tunisien du XXe siècle. Il lutte activement pour l'émancipation de la femme et l'abolition de la polygamie dans le monde musulman. Ses idées essuient un vif refus de la part des franges les plus conservatrices de la société.

  [21] El-Haddad.T, Notre femme,la législation islamique et la société, Maison tunisienne de l’édition, 1978, PP 156-157.

  [22] Merad.A, Le réformisme musulman de 1925-1945, Mouton, Paris, 1967, P 330.

  [23] Gardant.M, Nationalité et Citoyenneté, les femmes algériennes et leurs droits, in les femmes et la modernité, « Peuples méditerranéens », N° 44-45, Juillet-Aout 1988, P 297.

[24]Dans une  investigation de terrain sur la question du  « rapport des jeunes à la femme à la lumière des changements des valeurs en Algérie », nous avons ciblé 100sujets, répartis comme suit : 50 jeunes entre 20 et 30 ans (soit 50 filles et 50 garçons), avec un niveau d’instruction moyen (chômeurs, trabendistes, petits commerçants et  agents d’administration ou de sécurité) et  50 jeunes étudiants de l’université d’Oran : (25 G. et 25 F).

[25]Soit 70% des sujets estiment que les études en sciences médicales, langues étrangères et littérature, sont les mieux  appropriées pour les filles,et seulement 20% estiment qu’elles peuvent étudier toutes les disciplines.La comparaison entre les jeunes non universitaires  et universitaires n’est pas significative. La répartition par sexe renforce davantage l’image traditionnelle de la femme qui domine encore les mentalités des jeunes algériens (soit 30/50 des sujets de sexe féminin et 35/50 des garçons, estimant  que les disciplines littéraires, langues étrangères et sciences médicales conviennent le mieux à la nature des femmes).Ces enseignement débouchent vers les professions réservées traditionnellement aux femmes, comme l’enseignement  et  les professions médicales etc.

[26]Jadis, on disait dans un proverbe arabe « La femme sort trois fois dans sa vie : du ventre de sa mère à la naissance, de la maison de son père pour aller dans celle de son mari, de la maison de son mari pour aller au cimetière. ».

   [27] Mernissi.F, Identité culturelle et Idéologie sexuelle, le cas du Maroc et de la Chine, 14e congrès international d’Alger, OPU, Alger, 1978, p 746.

[28]Coran, Sourate IV, verset 38, traduction de R. Blachère.

[29]  « O Prophète, recommande à tes épouses, à tes filles et aux croyantes de rabattre leurs voiles sur le front. Cela permettra de les distinguer et les mettre à l'abri de démarches incorrectes » (sourate 33.59).Certain réformiste musulman, comme Djamel El-Benna propose une autre interprétation de ces versets coranique,de la façon suivante : « elle ne signifie pas que toutes les femmes ont l’obligation de se voiler. Ce passage du Coran, selon eux, s’adresse de toute évidence aux femmes du Prophète, et ne peut être étendu à l’ensemble des femmes ». Les Fondamentalistes, quant à eux, légitiment le port du voile par ce passage du Coran - parmi d’autres.

[30]Staël, Madame de (1766-1817), femme de lettres française, elle a exercé une profonde influence sur la littérature romantique.


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Mohamed Benali, «Les jeunes algériens et leurs représentations de la femme modèle et le devenir ... »

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Papier : pp : 3 - 19,
Date Publication Sur Papier : 2009-05-05,
Date Pulication Electronique : 2012-05-03,
mis a jour le : 14/01/2019,
URL : https://revues.univ-setif2.dz:443/revue/index.php?id=358.